Le geste : opérateur enactif de présence

Olivier Gapenne (CRED-UTC, Compiègne)

Le paradigme de l'enaction, récemment développé en sciences cognitives en particulier à partir des travaux de Francisco Varéla et Humberto Maturana, promeut une science de l'expérience et de la connaissance inspirée de l'organisation des systèmes vivants et non des systèmes formels. Ce nouveau positionnement théorique conduit à repenser la conception des technologies d'interaction non comme optimisation de l'accès à l'information à des fins de représentation mais comme optimisation des moyens d'actions et plus largement de couplage à des fins de constitution (enaction design). L'engagement via les instruments favoriserait l'apparition sur fond d'invariants dynamiques et non la représentation sur fond de codage symbolique. Rendre présent (au sens de présence dans l'expérience) est d'ailleurs l'une des traductions possibles de « to enact » issu de la pratique théâtrale. Et dans ce cadre, le geste et son instrumentation ont un rôle habilitant tout autant que contraignant. Le paradigme de l'enaction n'est donc pas porteur d'une rupture avec l'informatique mais plutôt d'une reformulation du dialogue humain/machine au regard de l'irréductible différence des organisations vivantes et computationnelles (dont le statut de représentations externes est manifeste et puissant).